Le Collectif pour la gratuité des transports publics dans l'agglomération grenobloise
Campagne pour des transports en commun gratuits
Le Collectif pour la gratuité des transports publics dans l'agglomération grenobloise milite pour que les transports en commun soient gratuits pour toutes et tous dans l'agglomération.
Il est composé de citoyen-nes, mais aussi de syndicats, d'associations et de partis politiques.
Plusieurs groupes "locaux", à Saint-Martin-d'Hères, Grenoble, Fontaine, Saint-Egrève et Voiron, se retrouvent régulièrement pour discuter et organiser des événements autour du sujet des transports gratuits.
Le Collectif est ouvert à toutes les personnes voulant s'engager sur ce thème.
Depuis fin 2014, le collectif a lancé une pétition que l'on peut signer.
Il propose également un Memento avec l'ensemble des arguments et des chiffres en faveur des transports gratuits.
* * *
Pour en savoir plus, nous vous proposons une interview de plusieurs membres du Collectif. Cette interview a été menée par le média ici Grenoble en février 2017.
ici Grenoble : Quand et comment est né le Collectif pour la gratuité des transports publics dans l'agglomération grenobloise ?
Courant 2014, nous avons organisé plusieurs rencontres entre des syndicats, des associations et des partis politiques autour de l’idée de la gratuité des transports en commun. Au fil des discussions a émergé la nécessité de créer un collectif pour organiser une campagne sur cette question, dans toute l'agglomération.
La création du collectif a été officiellement annoncée lors d’une conférence de presse en décembre 2014. Le collectif regroupe aujourd’hui des syndicats (CGT, FSU, Solidaires, UNEF, UNL, Solidaires Étudiants), des organisations politiques (PAG38, PCF, Ensemble !, les Alternatifs, NPA), et des associations (ATTAC, INDECOSA-CGT).
Les premières questions que l'on se pose quand on parle de gratuité des transports publics sont : Combien ça coûte ? Est-ce réaliste financièrement ? Quel est le coût pour les collectivités locales par rapport au fonctionnement actuel ? Qui payera ? Dans une période où l'on parle sans cesse d'austérité budgétaire, les collectivités ont-elles concrètement les moyens de cette dépense ?
Commençons par rappeler comment sont organisés les transports en commun. Dans l'agglomération grenobloise, la SEMITAG (Société d'économie mixte des transports publics de l'agglomération grenobloise) est une délégation de service public en charge de l'organisation des transports et de la billeterie. Le SMTC (Syndicat Mixte des Transports en Commun de l'Agglomération Grenobloise) organise cette délégation de service public et son financement. Le SMTC est composé d’élu-e-s de la Métropole et du Conseil Départemental.
Pour la plupart des réseaux de transports en commun en France, la part des usagers dans les recettes est inférieure à 20%. Elle est de 16% pour le SMTC. L’essentiel du financement vient des entreprises via le versement transport (53%), de la Métro et du Conseil Départemental (43%) [plus de détails sur les chiffres ici]. Notons que dans les 16% de financement des transports en commun par les usagers, il y a aussi la participation des employeurs aux abonnements de leurs salarié-e-s.
Sans le financement des entreprises et des collectivités locales, le prix du billet serait donc très élevé...
C'est clair. Sans subventions, l'abonnement serait de l’ordre de 3000 euros par an pour chaque usager !
Rendre les transports en commun gratuits, c'est donc supprimer 16% des recettes du SMTC ?
En réalité, c'est moins de 16%. Si on supprime les frais de billettique et si on diminue les coûts liés au changement de mission des contrôleurs, nous estimons que le coût de la gratuité devrait être de l’ordre de 10% des recettes. Cela correspondrait à une vingtaine de millions d'euros de budget par an.
20 millions d'euros par an... C'est une somme difficile à mesurer. Donnons quelques chiffres, à titre de comparaison. Le stade des Alpes a coûté environ 75 millions d'euros en 2008, et nécessite 1 million d'euros de subventions publiques par an. Le centre de recherches Minatec a coûté environ 150 millions d'euros en 2006. Les collectivités locales et l'État vont investir plus de 250 millions d'euros pour l'installation de la fibre optique en Isère. Où trouver les 20 millions d'euros pour des transports en commun gratuits, chaque année ?
En nous inspirant des nombreux exemples venant d'autres communautés d'agglomération en France et d'ailleurs, nous étudions actuellement les différents leviers qui permettraient de lever ces fonds. Et ces leviers sont multiples ! Sans être exhaustif, on pourrait jouer sur la part du versement transport (impôt que les entreprises de plus de 10 salariés paient systématiquement aux collectivités locales) ou sur le taux de TVA appliqué aux transports (il a augmenté de 5% jusqu'à 10% sous les présidences Sarkozy et Hollande). C'est en jouant sur ces différents leviers, ou d'autres encore non explorés, que les collectivités locales pourront se donner les moyens de faire ce choix politique.
Mais prenons un peu de hauteur, car la question n'est pas seulement économique. Mettre en place la gratuité a un coût, c'est évident. Cependant, globalement, n'y gagne pas-t-on tous et toutes si la gratuité des transports en commun s'avère être un levier pour réduire l'usage des voitures individuelles pour les déplacements au quotidien ? Si, comme cela a été observé à Aubagne, les "coûts indirects" comme ceux liés à la santé (pollution, accident du travail lors du transport domicile-travail) et les coûts économiques (bouchons) sont diminués ? Si le pouvoir d’achat des personnes empruntant les transports en commun est amélioré ?
Quelles sont les autres villes ou agglomérations ayant fait ce choix ? Avec quels résultats sur la fréquentation des bus et des trams ?
En France, une trentaine d’agglomérations ont déjà instauré la gratuité de leurs transports en commun. Depuis 2009 l’agglomération d’Aubagne fait référence en la matière. Elle a fait l'objet de nombreuses recherches et articles [ici, là ou là]. Globalement, on constate une augmentation continue du nombre de passagers depuis la mise en place de la gratuité, soit un quasi triplement de la fréquentation.. Il ne s'agit pas d'une augmentation liée à des personnes qui feraient des tours de bus le dimanche pour le plaisir. Le report modal, c'est-à-dire le fait de laisser sa voiture pour privilégier le transport en commun, est prouvé : +35% !
Et concernant la qualité de l'air ?
Nous ne disposons pour le moment d'aucun chiffre solide pour étayer un argument concernant la pollution atmosphérique. Cependant, si le report modal a été prouvé à Aubagne, on peut logiquement penser que la pollution dûe aux voitures individuelles a été réduite.
Existe-t-il une étude prospective indépendante sur les effets espérés d'une telle démarche dans l'agglomération grenobloise ?
À notre connaissance, il n'y a pas d'étude spécifique à l'agglomération grenobloise qui viserait à établir que le passage à la gratuité aurait un impact sur l'usage au quotidien de la voiture individuelle et la qualité de l'air. Cependant, à une petite échelle de l'agglo, les entreprises de la Presqu'île-Giant ont mis en place "un plan de déplacements". L'une des mesures phares est le remboursement à 85% des titres de transports. La conséquence est assez nette : l'utilisation de la voiture en solo a baissé de 15 %.
En tout cas, si une étude sérieuse devait être faite dans l'agglomération grenobloise, il faudrait faire attention de bien prendre en compte plusieurs points importants.
Lesquels ?
Tout d'abord, le report modal n'est pas seulement incité par la gratuité, mais aussi par une offre de transport en commun efficace. Les zones les plus éloignées des centres ne doivent pas être oubliées. Avec la gratuité, il faut maintenir l'investissement dans les infrastructures, non seulement le maintien des lignes, mais aussi leur développement, l'augmentation des fréquences.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier l'aspect social. Comme cela a été constaté à Aubagne, des catégories de la population n'avaient qu'un usage très limité des transports en commun, à cause, entre autres, du prix des billets. Passer à la gratuité, c'est permettre à tout le monde de bouger, d'investir les centres, les périphéries, au lieu d'être contraint-e-s à rester coincé-e-s dans une zone en particulier. La mobilité et la mixité des quartiers, à nos yeux, ça n'a pas de prix !
Comment la gratuité des transports en commun est-elle perçue en interne du SMTC et de la SEMITAG ? Si les transports sont gratuits, que vont notamment devenir les contrôleurs ?
Sans connaître personnellement le sentiment du personnel à la SMTC, nous pouvons néanmoins reprendre le cas d’Aubagne. Au départ, le personnel était réticent à la gratuité. Mais après une visite à Châteauroux, où les transports en commun sont gratuits depuis 2001, le personnel s’est montré finalement plus favorable à l’idée et le reste maintenant après plusieurs années en gratuité. À Grenoble, il nous faut convaincre les équipes du SMTC et de la SEMITAG que nous ne voulons pas dégrader leurs conditions de travail. La gratuité, c’est aussi synonyme de moins de pression, moins de stress et moins d’agressions.
Quelles sont les actions menées par le Collectif pour atteindre son but ?
Nous agissons sur plusieurs terrains. Nous distribuons des tracts informatifs en ville, aux arrêts de bus, aux marchés. Un groupe au sein du collectif est chargé de collecter des données et les synthétiser avec un argumentaire dans un Memento.
Nous sommes également en contact avec d'autres collectifs au niveau national pour faire des retours d'expériences et diffuser nos arguments. Nous organisons aussi des débats publics.
Enfin, nous sollicitons les élu-e-s pour leur présenter le projet. Nous sommes organisé-e-s en groupes par ville, en collectifs locaux qui envoient alors une personne déléguée à la réunion mensuelle du collectif de l'agglomération. Tout le monde intéressé peut venir lors des rencontres des collectifs locaux.
Concrètement, qui a le pouvoir de décision pour mettre en place la gratuité des transports publics dans l'agglomération grenobloise ?
Les élu-e-s de la Métropole, dont une partie siège au SMTC.
Pensez-vous que votre projet puisse aboutir dans les années à venir, étant donnés les responsables politiques actuels ? Ou votre projet est-il avant tout d'influencer les "esprits" pour que les prochains élus locaux mettent en place les mesures que vous proposez ?
Les problèmes liés au changement climatique, à la pollution de l’air ainsi qu’à la crise sociale appellent des mesures urgentes et de grande ampleur. La gratuité, dans ses effets, répond en partie à ces enjeux.
Courant 2017/2018, Niort et Dunkerque appliqueront la gratuité. C'est un phénomène en expansion ! Les idées et les actions avancent ! Nous sommes optimistes, mais nous devons maintenir le rythme pour diffuser les idées et apporter de nouveaux arguments en suivant constamment les exemples des autres villes.
Ces mois derniers, nous avons toutes et tous soufferts de la récurrence des pics de pollution, durant lesquels la gratuité des transports en commun a été activée pendant quelques jours. Mais c’est la pollution permanente qui a des conséquences néfastes sur la santé. Pour pallier la pollution, il faudrait, entre autres, une augmentation massive de l'usage des transports en commun et une réduction de l’usage de la voiture. Pour cela il existe un levier : la gratuité permanente !
Avez-vous actuellement beaucoup d'élu-e-s qui soutiennent votre démarche ?
Le maire de Fontaine (président de la SEMITAG) et la maire de Venon (membre du SMTC) ainsi que certains conseillers municipaux de Grenoble se sont prononcés en faveur de la gratuité des transports en commun.
Que peuvent faire les gens qui souhaitent participer aux luttes du Collectif pour la gratuité des transports publics dans l'agglomération grenobloise ?
N'hésitez pas à venir nous rencontrer aux permanences ou aux réunions des collectifs locaux. À lire notre Memento et à se documenter sur le sujet. À signer notre pétition. À discuter autour de soi des possibilités qu'offriraient le passage à la gratuité. Le débat doit continuer !
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